21.01 → 16 .04.2006
Intra-murosJaume Plensa
Cette exposition présentait des livres, estampes et multiples, datés entre 1978 et 2005, de l’artiste Jaume Plensa. Elle nous rapprochait du merveilleux au fil de près de 150 œuvres qui reflètent les obsessions de l’artiste : l’absence, le désir, l’impossibilité, le silence.
Né en I955, Jaume Plensa vit et travaille à Barcelone. Il expose régulièrement en Espagne, en France, en Italie, en Allemagne et aux États‑Unis. Répondant à de nombreuses commandes publiques, il est l’auteur de sculptures monumentales en Espagne, en France, en Angleterre, au Japon, en Israël ou encore au Canada.
Plus que tout autre artiste de sa génération, Jaume Plensa s’est imposé sur la scène internationale par la richesse et l’extrême diversité de sa production, passant avec une réelle aisance du plus intime au plus spectaculaire.
Le bronze, le fer la résine, le verre, mais aussi la lumière, le son, la vidéo, Jaume Plensa utilise toutes sortes de matériaux pour créer ses sculptures, tant il vrai que ceux‑ci ne sont pas une fin en soi, mais bien des vecteurs de la pensée et des émotions. Dans le domaine de l’estampe et du livre, il aura recours aux techniques traditionnelles de la gravure comme aux procédés les plus expérimentaux. Avec une très grande liberté, il invente son propre vocabulaire, sollicite de nouveaux moyens. L’eau‑forte, l’aquatinte, le carborundum, le bois gravé, lithographie voisinent ainsi et parfois se combine à d’autres éléments plus surprenants.
« Ma façon de réfléchir est visuelle. »
— Jaume Plensa
L’un des thèmes majeurs explorés par Plensa est sans conteste le corps humain, point de référence d’un grand nombre de ses œuvres. Motif principal de plusieurs estampes ou matérialisé dans des sculptures, le corps n’est cependant présent dans bien des cas que de manière virtuelle. À la représentation du corps, l’artiste préfère souvent la suggestion, voire une description physiologique. De fait, rien de plus efficace pour exprimer l’universalité du corps que de dresser la liste des organes, éléments et autres substances qui le constituent. Beaucoup de ses œuvres existent pour nous rappeler que la science ne peut tout expliquer ; qu’elle ne peut suffire à dissiper les mystères de notre relation au monde. Bien au contraire, de nouvelles interprétations – poétiques et visuelles – sont possibles.
C’est bien le corps qui intéresse Plensa et non la personne ou même la figure humaine, toujours anonyme quand elle apparaît. Non pas la chair, ni l’enveloppe, mais l’intérieur du corps, avec sa mécanique et ses organes, en tant que lieu traversé par des flux d’énergie. Ses œuvres semblent inspirées par une sorte de rêverie métaphysique qui, cherchant l’unité entre le corps humain et le macrocosme de l’univers, établit des rapprochements inattendus ou révèle des connexions cachées. Plusieurs estampes proposent ainsi de bien étranges combinaisons et classifications.
Guidé par la recherche des moyens les mieux adaptés pour traduire ses idées et ses obsessions, Jaume Plensa fait un usage abondant des mots et du texte poétique. À partir de 1993, nombreuses sont ses œuvres imprimées qui reposent sur l’association des mots et des images. Souvent, les mots sont figés sous le papier ; visibles, mais cachés, à la fois proches et lointains, parfois emprisonnés dans une enveloppe translucide. Plensa immobilise les mots, les rend muets, les maintient en suspension dans le temps et l’espace, comme ces paroles gelées dont parle Rabelais qui ne deviennent intelligibles que lorsqu’elles ont fondu. C’est non seulement cet état intermédiaire des mots gelés qui séduit l’artiste – et qui trouvera un équivalent plastique dans les mots moulés de nombreuses sculptures en résine – mais aussi le pouvoir qu’ont les mots silencieux de se transmuer quand ils sont confrontés à d’autres éléments, à des regards différents, à d’autres imaginaires. Bon nombre de ces mots expriment le désir ou l’absence et deviennent interrogations.
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